« Il vous faut
prendre conscience de ce que vous avez envie d'entendre et qui n'est
pas toujours ce que l'autre a envie de vous dire. »
(Catherine Bensaid)
« L'avantage de ne connaître rien à rien c'est qu'on peut parler de tout avec une égale inconscience. »
(Philippe Bouvard.)
Il
faut croire que l'actualité est à ce point pauvre que les sujets de
conversation dans les salons mondains, aristocratiques et poussiéreux
tournent autour du même sujet depuis quelques mois. Le mariage pour
tous fait parler les bavards, provoque des exégèses à n'en plus
finir et donne lieu à toute une série de commentaires tous plus
grotesques les uns que les autres. Monsieur tout le monde (pour ne
pas utiliser l'expression un tantinet péjorative de « français
moyen ») aurait pu croire que, une fois la loi votée, les
esprits s'apaiseraient et les polémiques stériles s'effondreraient
comme un soufflet façonné par une piètre ménagère. Il n'en est
rien. La seule intelligence qui ait pu être détectée dans ce
déferlement de sornettes provient de Frigide Barjot le jour où elle
a décidé de se taire. Sinon, ailleurs, on continue de débloquer.
La
France, prétend-on à qui veut bien l'entendre, est une république
démocratique : le fait qu'il y ait des élections à
intervalles réguliers suffit à le justifier. Même si des articles
de presse assez nombreux démontrent qu'en fait, la France « est
la dernière monarchie d'Europe », Monsieur tout le monde,
toujours lui, est persuadé depuis qu'il est tout petit, dès l'école
primaire, que la République est le meilleur des systèmes politiques
et que la démocratie à la française est représentative. La classe
politique, qui aurait trop à perdre si la population venait à ne
plus croire ce gros mensonge, utilise toutes les ruses possibles et
imaginables pour entretenir ce mythe. Il existe pourtant des
principes plus démocratiques, dans lesquels le peuple ne se contente
pas de délivrer des mandats électoraux (sorte de blanc seing pour
se faire plumer), et véritablement républicains, mais ces
messieurs, ci-devant élus et représentants de la Nation n'en
veulent pas. Pas assez lucratifs ?
Plusieurs
personnes pourraient présenter un nouveau projet de république, non
pas une sixième ou une nouvelle mouture hypocrite de la cinquième,
mais l'instauration de la République, laïque, sociale et
véritablement démocratique où tout citoyen, quelles que soient ses
idées, opinions, religion ou origines, pourrait s'exprimer et
s'impliquer dans l'élaboration de la loi. Les personnes auxquelles
je pense ont l'avantage d'avoir hérité de plusieurs siècles
d'histoire de France, ce qui, paradoxalement, est également leur
inconvénient. Sans doute, recourir à un Bonaparte, actuellement
Prince Napoléon, à un Bourbon descendant de Louis XIV, même s'il
est franco-espagnol, ou à Henri d'Orléans, héritier de Henri IV,
Charles X et Louis-Philippe, pour incarner cette nouvelle république
paraîtra étrange, anachronique voire « contre-nature »
pourtant les français auraient bien besoin que quelqu'un se penche
enfin sur leur sort.
Un
Bonaparte ou un Prince Napoléon ?
« Jean-Christophe
Napoléon, « prince Napoléon», né le 11 juillet 1986 à
Saint-Raphaël (France), est un membre de la maison impériale de
France. Il est l’actuel prétendant au trône impérial français.
Il a étudié au collège et lycée Saint-Dominique à
Neuilly-sur-Seine, puis à l’Institut privé de préparation aux
études supérieures (IPESUP) de Paris. Diplômé de HEC Paris,
Jean-Christophe Napoléon travaille aujourd’hui à New York, depuis
2011, comme conseiller à la banque d’affaires Morgan Stanley.
Malgré cette distance provisoire, entre lui et son pays natal, il «
pense avoir un devoir d’engagement et de dévouement au service de
la France. » Il souhaite « être un prince proche des
préoccupations générales des Français, défendre une cause
d’intérêt général, présenter des idées et les défendre, et
contribuer à la promotion de notre patrimoine dans le monde ».
(Source : Wikipédia)
Déclaration
de Louis de Bourbon, duc d'Anjou et de Cadix (alias Louis XX) :
« La question
institutionnelle n'a jamais été plus actuelle. Elle constitue un
enjeu politique de première importance et tous les Français doivent
souhaiter qu'elle soit publiquement débattue, pour ne pas laisser à
d'illégitimes oligarchies le soin de trancher pour nous la question
de notre avenir national.
Il n'appartient évidemment
pas à l'aîné des Capétiens de résoudre seul cette difficile
question institutionnelle. Mais il ne m'est pas interdit de regarder
avec sympathie et intérêt le développement de ces discussions au
sein de la société française. Et il est de mon devoir de rappeler
à tous les Français de bonne volonté, après tous mes
prédécesseurs, ce que mon regretté père appelait les « vieilles
recettes » de la royauté capétienne.
Pas plus que vous, je ne
sais ce qui viendra « après la Ve République ». Ce que je sais,
en revanche, c'est qu'aucun régime ne pourra durablement s'implanter
en France s'il cherche à dresser une France contre l'autre ; à
occulter le glorieux passé de notre patrie ; ou à conférer, plus
ou moins discrètement, le pouvoir à une petite caste de
privilégiés.
En réfléchissant à notre
avenir commun, il est sage d'écouter les leçons de notre passé. »
(Source:
http://www.democratie-royale.com
)
Lorsque
le descendant du Roi Louis-Philippe, Henri d'Orléans, prétendant au
trône, ne cherche pas des noises à son royal cousin espagnol, il
diffuse des textes sur son blog dont le nom est évocateur :
Maison Royale de France. Le Monsieur tout le monde dont il a été
question précédemment, serait en droit d'attendre d'un personnage,
qui porte sur ses épaules plus d'un millénaire d'histoire, des
propositions sérieuses et réfléchies pour l'avenir de notre pays,
des projets de rénovation de la démocratie ou, pourquoi pas, la
volonté de sauver la République du marasme qui l'engloutit petit à
petit. Eh bien non ! Ce monsieur, qui se dit Duc de France se
contente de gloser sur un sujet qui, même s'il ne manque pas
d'intérêt, est à des années-lumière des préoccupations de
Monsieur tout le monde, à savoir : le chômage, le coût de la
vie, la crise économique et l'argent qui lui sera versé lorsqu'il
aura fini par atteindre, de plus en plus tard, l'âge de la retraite.
Il est question d'honneur, d'honneur perdu et d'un autre à
retrouver. Si cela peut faire de bons sujets pour les épreuves du
Bac Philo, pourquoi mélanger les notions, certes fort honorables,
d'honneur et de conscience à des extraits tirés de La déclaration
des droits de l'homme, dont on confond manifestement les versions
(celles de 1789 et de 1793) pour sortir les mêmes âneries sur le
sujet dont tout le monde s'est désormais lassé : le mariage
pour tous.
« La plupart des
hommes ne tiennent à l'honneur que pour en couvrir leur
malhonnêteté. »
(Louis Dumur, Petits
aphorismes sur l'honneur – 1892.)
« L'honneur est la
morale de l'égocentrisme. »
(Edgar Morin ; Éthique –
2004.)
« L'honneur défend des
actes que la loi tolère. »
(Sénèque)
Je
cite trois extraits du dernier billet mis en ligne. (Petite
remarque : tout nouvel édito d'Henri d'Orléans chasse l'ancien
qui disparaît du site. C'est pourquoi il faut se dépêcher d'aller
le lire.)
« L'HONNEUR PERDU des
"forces de l'ordre" à qui l'on commande d'arrêter des
citoyens qui manifestent pacifiquement leur désapprobation du
démantèlement de la famille, alors que l'on laisse plus volontiers
courir les violeurs récidivistes, les casseurs et les meurtriers.
Ainsi Nicolas ou un Curé sont mis derrière les barreaux pour leurs
opinions que leur dicte leur conscience, comme le furent pour ces
mêmes motifs tant d'hommes et de femmes sous les régimes
dictatoriaux et totalitaires. On efface ainsi avec une serpillière
l'Article XIV de la Déclaration des Droits de l'Homme : "Nul ne
doit être jugé et puni qu'après avoir été entendu ou légalement
appelé..."
L'HONNEUR des familles et
des veilleurs se manifeste pacifiquement, partout en France, en dépit
des gaz, des matraques, des barreaux de prison. Ils ne lâchent rien
poursuivant silencieusement, pacifiquement, joyeusement le combat
pour l'honneur, le leur et celui de la France éternelle, contre la
mort annoncée de notre civilisation et de notre conscience.
L'HONNEUR de nombre de
Maires de France, qui ne veulent pas de cette mascarade de mariage
pour tous, alors qu'ils ne sont nullement opposés à une union
civile, ni ne sont homophobes. Mais ils ont une conscience et le sens
de leurs responsabilités. »
Avant
d'éplucher ces quelques phrases, d'en extraire quelques unes des
bonnes blagues et d'en démontrer leur mauvaise foi, il y a une
question à ce poser : qu'est-ce que l'honneur ? Pour cela,
je consulte un dictionnaire en ligne :
Honneur
(au singulier) :
- Principe moral d'action qui porte une personne à avoir une conduite conforme (quant à la probité, à la vertu, au courage) à une norme sociale et qui lui permette de jouir de l'estime d'autrui et de garder le droit à sa dignité morale. Synon. honnêteté.
- Homme d'honneur. Homme vertueux, probe, intègre, courageux, qui ne transige pas avec les lois les plus strictes de la morale.
- Bien moral dont jouit une personne dont la conduite (conforme à une norme valorisée socialement) lui confère l'estime des autres et lui permet de garder le sentiment de sa dignité morale.
- Parole d'honneur. Engagement, promesse auquel on ne peut manquer sans se déshonorer.
- Considération que l'on accorde à une personne qui s'est distinguée par ses qualités morales, par des actions, des attitudes valorisées socialement.
Honneurs
(au pluriel) :
- Marque de respect, d'estime; manifestation extérieure qui rend témoignage de la considération, de l'admiration qu'on porte à une personne; privilège accordé à quelqu'un pour le distinguer, lui donner des marques de considération.
- Témoignages, marques de considération, d'estime, rendus à une personne qui s'est distinguée par sa conduite; marques de distinction.
- Fonctions, titres qui confèrent de l'éclat dans la société.
- Principales pièces qui servent aux cérémonies, aux sacres des rois, à la célébration des grandes cérémonies.
(Source:
http://www.cnrtl.fr/lexicographie/honneur
)
L'honneur
se base sur le respect de règles établies et reconnues par un
ensemble de personnes qui les reconnaissent comme valides et qui
s'efforcent de les respecter. La définition ne dit pas si le respect
de ces règles est individuel ou si les autres doivent
obligatoirement s'y conformer. Dans ce cas, il y aurait une sorte de
prosélytisme du même type que celui opéré par certaines religions
combattues.
Si
avoir de l'honneur, c'est défendre un certain nombre de valeurs
définies une fois pour toute par une certaine tranche de la
population, le fait de défendre des principes différents, même
s'ils sont humains, dans la logique de ce siècle, égalitaires et
justes, n'aurait donc aucun rapport avec l'honneur. Par conséquent,
l'honneur serait une qualité dont seules quelques personnes seraient
dotées à l'exclusion de tous les autres.
Pour
résumer les propos d'Henri d'Orléans, l'honneur serait du côté de
ceux qui sont contre le mariage pour tous et tous les autres,
quelles que soient leurs motivations et leurs convictions, n'en
auraient point. Or, cette force qui pousse les uns et les autres à
défendre leurs idées et opinions ne peut avoir qu'une seule et même
origine, encore faut-il admettre qu'elle puisse porter le même nom.
Il
y aurait bien une autre explication à cette énigme sémantique :
- Les manifestants qui défilent contre le mariage pour tous le font par honneur.
- Ceux qui sont pour l'application de la loi ne sont pas motivés par l'honneur mais par autre chose.
- Le mariage pour tous a divisé les manifestants en deux camps opposés : les pour et les contre.
- Les manifestants qui défilent pour le mariage pour tous sont motivés par une valeur contraire à l'honneur.
- Les antonymes de l'honneur recensés par les différents dictionnaires, sont les suivants : abjection, avilissement, déshonneur, discrédit, flétrissure, honte, humiliation, ignominie, improbité, indignité, infamie, malhonnêteté, moquerie, turpitude.
Il
est vrai qu'il est tellement plus facile, plus pratique et plus
reposant pour l'intellect de décréter arbitrairement que l'autre a
tort puisqu'on a raison, qu'on ne voit pas pourquoi on se gênerait
de prendre les partisans du mariage pour tous pour des scélérats et
les candidats à ce mariage pour des moins que rien. Mieux, pour
démontrer que l'honneur est du bon côté, on n'hésite pas à
sortir des arguments qui n'en ont même pas la forme, on invoque une
morale dont on ne précise pas la nature et on affirme des choses qui
ne reposent sur aucun fait concret. L'idée la plus originale dans
cette avalanche de mauvaise foi est d'avoir fait de cette absence
d'intelligence une question d'honneur. Cette fantaisie, il fallait
oser la trouver et la conjuguer, si l'on peut dire, à toutes les
sauces pour en sortir une série de constatations dont certaines sont
pour le moins hasardeuses.
Parmi
la liste des personnes qui défendent leurs actions avec honneur,
figurent des maires et pas n'importe lesquels : ceux qui
décident de ne pas faire ce pour quoi ils sont élus, c'est à dire
représenter l’État en faisant appliquer les lois de la
République. Je veux bien admettre qu'un prétendant au trône, qui
continue de véhiculer des remugles vieillots autant que vieillis sur
les mérites et les avantages d'une royauté ou d'une monarchie, dont
on ne nous dit jamais rien de précis, n'ait pas de véritables
attachement pour la République, quelle qu'en soit son acception. De
là à trouver honorable de désobéir avec tapage et jusqu'au
ridicule, il n'y a qu'un pas qu'il franchit gaiement et sans
scrupules. Certes, il existe l'obligation de désobéissance mais ce
principe s'applique pour des causes autrement plus graves telles que
l'invasion des armées nazies, les lois du gouvernement d'un maréchal
sénile ou la dénonciations de familles sous le prétexte qu'elles
ne sont pas chrétiennes (voire catholiques). Nombreux sont ceux qui
auraient souhaité, à cette époque troublée, voir l'intégralité
des maires refuser d'obéir. Il est vrai également qu'on approche
des élections municipales et que beaucoup de ces maires préparent
leur campagne : il vaut mieux parfois désobéir pour être
réélu quitte à retourner sa veste par la suite et marier tout le
monde sans se poser de questions existentielles.
Henri
d'Orléans reconnaît aux manifestations des opposants au mariage
pour tous le caractère pacifique et joyeux. Il aurait pu étendre sa
liste d'adjectifs par ceux-ci : serein, convivial, festif ou
encore sympathique, populaire et allègre. Si c'est ce qu'il pense,
après tout, c'est son droit mais faire passer les participants de ce
qu'on voulut appeler le « printemps français » pour des
victimes ou des martyres, il ne faut quand même pas exagérer. Un
défilé, même silencieux, calme et paisible où les affiches et
autres pancartes véhiculent des slogans mensongers, erronés ou hors
de propos fait tout autant de dégâts que n'importe quelle émeute.
Quand on claironne qu'on veut défendre les enfants (contre quoi
déjà?) on ne leur siffle pas des sottises désuètes, rétrogrades
et supposées naturelles aux oreilles.
Dans
son texte, Henri d'Orléans fait référence à la France éternelle,
un concept qu'il se garde de définir, par peur d'effrayer les
honnêtes gens, sans doute. Qu'est-ce donc que cette France
éternelle ? Un pays idyllique, mythique et immuable qui
servirait de référence ou de mètre-étalon pour les valeurs en
usage dans notre société ? Une simple expression dans un texte
pour évoquer les temps glorieux, heureux et lointains ? Une
licence poétique posée là pour rassembler les vilaines brebis
égarées, les mécréants et les scélérats qui veulent se marier
entre eux ? Où et quand doit-on placer cette France
merveilleuse, immuable et éternelle, à supposer qu'on puisse
véritablement la localiser quelque part ? La chose n'est pas
simple.
- La France n'a pas toujours eu les frontières qu'elle a aujourd'hui. Le territoire sur lequel Hugues Capet, Philippe Auguste, Charles VII, Louis XIV, Louis XVI, Napoléon Ier, Napoléon III ou la Troisième République exerçaient leur pouvoir n'était pas le même. Sur un peu plus d'un siècle, L'Algérie a été conquise puis rendue à son peuple, l'Alsace-Lorraine a été annexée à l'Empire allemand avant de redevenir française quant à l'empire colonial, il n'en reste officiellement plus rien (sauf pour Elf, Total, Aréva...). La France éternelle , ce ne peut être cela.
- La France a rayonné sur l'Europe avec sa culture, ses artistes et ses penseurs. Je pense à Rabelais, à Montaigne, aux poètes de la pléiade (ils étaient sept, parmi lesquels Ronsard et du Bellay) à Descartes, Racine, Corneille, Molière, Montesquieu, Diderot et d'Alembert, mais aussi à Chateaubriand, Balzac, Flaubert, Prudhon, Zola. A quelle France doit-on rattacher cette France éternelle ? A ce que les historiens appellent « le grand siècle » ou à celui dit « des lumières ». A la France de la Révolution Française, celle du Premier Empire, celle de la Monarchie de Juillet, celle de la révolution industrielle ou celle de la Troisième République ? Ces différentes époques n'avaient pas grand chose à voir les unes avec les autres et les valeurs n'étaient pas forcément les mêmes.
- La France éternelle peut enfin être un fantasme, une utopie. Même dans ce cas, je doute que cette France idéale soit conçue dans les mêmes termes par les deux prétendants au trône (les Bourbons et les Orléans), Jean-Luc Mélenchon, Olivier Besancenot, Marine Le Pen, Nicolas Sarkozy ou François Hollande. Si on les interrogeait sur cette France éternelle, il est assuré que les recettes seraient dans certains cas, contraires.
- Il reste une dernière possibilité : la France éternelle est un mythe, un concept, et à ce titre, elle n'existe tout simplement pas. Il n'est déjà pas possible de connaître avec exactitude ce que sont ces sacro-saintes valeurs républicaines que nombre de politiciens brandissent régulièrement alors qu'elles doivent bien correspondre à quelque chose de concret (puisqu'elles sont supposées servir à l'intégration des étrangers dans la Nation française). La France éternelle est une vision de l'esprit tout comme le Jérimadeh de Victor Hugo qui n'a été forgé que pour une rime.
Henri
d'Orléans doit aimer les formules toutes faites qui font l'effet
d'un pétard (un pétard mouillé) mais ne reposent sur aucune
observation tangible ou sérieuse. Il affirme, et il n'est pas le
seul, que le mariage pour tous va conduire à ce qu'il appelle le
démantèlement de la famille. Creusons un peu ce nouvel épouvantail
pour simples d'esprit (à qui les évangiles promettent le royaume
des cieux, si je me souviens bien).
Démanteler :
« Détruire ce qui se
présente comme un ensemble organisé (fait de parties qui tiennent
ensemble comme les moellons d'une muraille) et l'éparpiller. »
Je
ferai remarquer, qu'en son temps, le divorce avait fait redouter les
mêmes choses. La cellule familiale se scindait, certes, mais pour se
reformer autrement. Ce qu'on appelle désormais les familles
recomposées sont aujourd'hui très courantes et les enfants qui y
sont élevés n'ont pas forcément leurs deux parents sous leur toit.
L’Église ne reconnaît toujours pas le divorce mais les juges de
la République en prononcent quand même tous les jours. Le principe,
quoi qu'on en pense, est entré dans les mœurs.
La
famille :
Le mot « famille »
peut prendre deux sens différents. Il peut désigner l’ensemble
des personnes qui ont des liens de parenté et d’alliances tel que
grands-parents, oncles, tantes, cousins. Il désigne aussi un groupe
de personnes vivant ensemble dans le même foyer, généralement les
parents et les enfants.
Pour les historiens, une
famille est un ensemble de personnes ayant un lien de parenté.
Pour les sociologues, ce
sont des personnes habitant sous le même toit tel que deux
colocataires.
Pour l'INSEE, une famille
est la partie d'un ménage comprenant au moins deux personnes et
constituée :
- soit d'un couple vivant au sein du ménage, avec le cas échéant son ou ses enfant(s) appartenant au même ménage ;
- soit d'un adulte avec son ou ses enfant(s) appartenant au même ménage (famille monoparentale).
Pour qu'une personne soit
enfant d'une famille, elle doit être célibataire et ne pas avoir de
conjoint ou d'enfant faisant partie du même ménage.
Un ménage peut comprendre
zéro, une ou plusieurs familles. »
Le
combat pour l'honneur des veilleurs fait encore et toujours référence
à ces opposants au mariage pour tous qui sont capables de se
mobiliser pour une affaire qui ne les concerne finalement pas. Or,
l'être humain, quand il n'est pas le parfait égoïste qui est
capable de tout pour satisfaire son propre intérêt, quitte à
écraser son voisin, ses collègues et trahir ses amis, s'occupe de
son prochain et se mêle, disons-le carrément, de ce qui ne le
regarde en rien. Dans ces cas, fort fréquents, il n'hésite pas à
vouloir imposer à autrui des modes de vie, des croyances ou des
valeurs qu'il ne respecte pas nécessairement lui-même. Il y a
pourtant de nombreux autres sujets d'indignation qui devraient faire
l'objet de manifestations mais ils n'ont assurément pas la même
importance. En vérité, qu'est-ce qu'on en a à faire de tous ces
travailleurs qui se retrouvent du jour au lendemain à la rue parce
que les usines déménagent en Asie ? Qui se préoccupe des
familles qui vivent en dessous du seuil de pauvreté, réduites à
mendier auprès des services sociaux tandis que les financiers
engrangent des profits scandaleux ? Qui s'offusque des mensonges
éhontés qu'on fait avaler aux peuples d'Europe pour engraisser les
banques ? Là, personne ! S'il y a un combat et un honneur
à défendre, il faudra bien que quelqu'un se décide à dire aux
veilleurs qu'ils se trompent de cible. Les manifs pour tous ont
l'avantage d'occuper les esprits et de distraire les foules :
ailleurs, on s'occupe de votre avenir et là, ce ne sera pas la même
histoire.
« Nous allons prendre
conseil de notre conscience. Elle est là , dans cette valise, tout
couverte de toiles d'araignée, On voit bien qu'elle ne nous sert pas
souvent. »
(Alfred Jarry)
« La conscience est
un bâton que chacun prend pour battre son voisin. »
(Honoré de Balzac)
« Les gens qui ont
bonne conscience ont souvent mauvaise mémoire. »
(Jacques Brel)
Le
mariage pour tous, qui n'est somme toute qu'une simple formalité
légale, un passage d'une dizaine de minutes devant le maire,
officier d'état civil, est le prélude à une catastrophe presque
galactique digne de la fin des temps et des apocalypses qu'on nous y
promet. On essaiera de ne pas rire ou se moquer de la simplicité
naïve de la menace qui pèse au-dessus de nos têtes : lorsque
deux hommes ou deux femmes voudront signer l'acte par lequel ils
fondent une famille, d'un genre nouveau, je le reconnais, la fin du
monde sera proche et il faudra se préparer d'une part à la venue de
l'Antéchrist et d'autre part à « la mort de notre
civilisation et de notre conscience », comme le rapporte le
prophète royal d'Orléans. L'annonce de cet événement dont le
tragique relève plus du grandguignol que de la possible occurrence,
est à ce point grotesque que je ne m'y étendrai pas plus que ça.
- Pour ce qui est de la civilisation, l'histoire de l'humanité nous a appris que les civilisations naissaient, croissaient et s'effondraient un jour pour des raisons qui s'expliquaient. Les guerres, l'économie ou la politique ont eu raison des anciens empires tels que l'Egypte, la Perse, Rome, Byzance. Plus près de nous, des événements majeurs ont bouleversé notre quotidien : la Révolution Française, l'industrialisation, les deux guerres mondiales, l'Europe et les crises financières de ces dernières années. L'avenir nous promet encore bien des péripéties et il est probable que l'une d'entre elles viennent de Chine (ce qu'on avait appelé, dans les années 1950, « le péril jaune ». A chacun de ces changements, les habitudes et les valeurs ont changé : l'apparition du Christianisme, l'émergence de l'Islam, la Renaissance et les différentes révolutions, même si elles ont transformé durablement et en profondeur la société n'ont jamais causé sa disparition brutale.
- La mort de notre conscience doit être une étape ultime, quelque chose d'encore plus épouvantable que la mort de la civilisation. J'ai eu beau chercher des références historiques, littéraires ou même ésotériques, je n'ai rien trouvé d'autre que des sujets d'intérêt clinique tels que celui-ci : que se passe-t-il après la mort ? Selon l'adage scientifique qui dit que « rien ne se perd et rien ne se crée, tout se transforme » je peux affirmer qu'il y a toujours un après et que les personnes qui vivaient avant seront toujours là. Peut-être auront-elles conservé leurs illusions ou auront-elles choisi de vivre avec leur temps. L'avenir nous le dira.
Le
dernier point soulevé par l'extrait du texte d'Henri d'Orléans
concerne la conscience et le sens des responsabilités des maires qui
refusent d'appliquer la Loi, se situant au dessus de la Nation et de
ses représentants. Je vais rappeler ce que signifient les termes de
conscience et de responsabilité avant de faire mon commentaire.
Conscience :
- Propriété particulière de la conscience humaine qui permet à l'homme de porter des jugements normatifs immédiats, fondés sur la distinction du bien et du mal, sur la valeur morale de ses actes; connaissance intuitive, sentiment intime de cette valeur.
- Affaire de conscience. Problème mettant en jeu la conscience morale parce qu'il implique, pour que soit préservée la paix de la conscience, le besoin et la nécessité, malgré certaines difficultés, de se conformer à une obligation morale.
- Bonne conscience. Conscience satisfaite de l'homme qui a le sentiment d'agir conformément aux valeurs morales et de n'avoir aucun reproche à se faire.
- Se donner bonne conscience. Trouver les accommodements et l'indulgence nécessaires vis-à-vis de soi-même pour avoir à moindre frais le sentiment de s'acquitter de ses obligations morales et de n'avoir rien à se reprocher.
- Liberté de conscience. Liberté laissée à chacun, en particulier par les pouvoirs publics, de juger des doctrines, religieuse et philosophique notamment, qui lui conviennent, accompagnée de la liberté d'y conformer sa vie.
- Vendre sa conscience. Abandonner à d'autres personnes, en échange de certains avantages, son pouvoir et son droit de juger par soi-même et de se déterminer librement.
- Objection de conscience. Action d'objecter des devoirs supérieurs d'ordre religieux, ou simplement moral, pour refuser d'accomplir une obligation légale. Refus d'accomplir ses obligations militaires au nom de la religion, ou de la morale, qui condamne la violence et le fait de tuer.
- Conscience (professionnelle). Scrupuleuse honnêteté que l'on apporte à l'exécution de son travail, inspirée par le sens des exigences de sa profession accompagné de la volonté de s'en acquitter au mieux quelles que soient les difficultés.
- Cas de conscience. Difficulté créée par une situation ambiguë où la conscience hésite à se déterminer dans un sens précis faute d'une prescription religieuse à laquelle se référer dans un tel cas.
Responsabilité :
- Définition : Fait d'être responsable, de devoir répondre de ses actes ou de ceux de quelqu'un d'autre, ou d'avoir à sa charge des décisions. Synonyme : obligation.
- «La personne responsable assume les conséquences de ses actes, qu’ils soient délibérés - c’est-à-dire résultant d’une décision prise ou acceptée - ou non, de telle manière que les autres en bénéficient au maximum ou, du moins, n’en souffrent pas. En même temps, elle fait en sorte que les autres se comportent de la même façon”.
- Sens des responsabilités : Capacité de rencontrer ses obligations, de remplir ses devoirs et de porter les conséquences de ses actes.
- La responsabilité morale consiste en une capacité pour un sujet volontaire et conscient de prendre une décision sans en référer au préalable à une autorité supérieure, à pouvoir donner les motifs de ses actes, et à être jugé sur eux.
Les
élections municipales approchent et bien des maires sont près à
tout pour être à nouveau élus. L'avantage du mariage pour tous est
incontestable : qu'on soit pour ou contre ou que l'électorat
soit pour ou contre (le candidat à la mairie adoptera celui de la
majorité qui l'élira – c'est ce qu'on appelle un cas de
conscience) la publicité est gratuite. C'est le moment de bâtir sa
campagne électorale sans risquer d'avoir ses comptes rejetés par le
Conseil Constitutionnel. C'est beau la démocratie !
« Votre morale n'est pas la mienne. Votre conscience n'est plus la mienne. »
(Albert Camus.)